L’édito – Le scénario noir

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La magie de Noël, décidément, ne s’étend pas à la vie politique. En dépit de l’atmosphère de fête qui prévaut, il faut bien regarder en face le danger qui menace la démocratie française en raison de l’impéritie d’une grande partie de la classe politique. Un scénario qui a toutes les apparences d’une tragédie en cinq actes.

Acte I. Incapable de trouver un compromis avec la partie raisonnable de la gauche, le gouvernement Bayrou essuie une première motion de censure au moment du discours de politique générale. Les socialistes n’ont reçu aucune assurance qui leur permettrait de s’abstenir : contraints de préserver l’unité du NFP pour rester fidèles à leurs demandes, ils joignent, bon gré, mal gré, leurs voix à celles de la France insoumise. L’équipe Bayrou ne doit sa survie qu’à l’abstention du RN, qui joue la respectabilité en refusant de renverser aussi vite le nouveau gouvernement.

Acte II. Toujours décidé à sauvegarder le bilan du président Macron, le Premier ministre échoue à négocier sur la réforme des retraites et sur le budget. Au mois de février, au terme de vaines discussions parlementaires, le fossé est toujours aussi profond entre la gauche et le centre. Le NFP dépose une nouvelle motion de censure. Jugeant que l’heure est venue de jouer son va-tout présidentiel face à une gauche dominée par LFI et un « bloc central » impopulaire et affaibli, Marine Le Pen vote également le texte de la gauche. Le gouvernement Bayrou tombe.

Acte III. Cette nouvelle crise plonge l’opinion dans le désarroi et la colère. Aux yeux d’une grande majorité de Français, le responsable de cette instabilité permanente s’appelle Emmanuel Macron, qui a dissout sans savoir où il allait, qui a nommé successivement deux Premiers ministres incapables de gouverner, tandis que la crise économique multiplie les fermetures d’usine et les licenciements. La pression monte contre le président, qui ne parvient pas à trouver une solution au désordre qu’il a lui-même déclenché.

Acte IV. Au bout d’une interminable séquence de charivari politique, désavoué par l’opinion, conspué par les partis d’opposition, et abandonné par plusieurs de ses anciens soutiens, le président est acculé. Pour la presse, pour l’opinion et pour la classe politique seul un retour aux urnes permettra de dénouer l’imbroglio. De manière mettre le peuple en mesure de trancher, Emmanuel Macron doit démissionner.

Acte V. Ayant préparé cette éventualité de longue main, le RN et LFI se lancent dans une campagne virulente, fondée sur un argument imparable : les partis de gouvernement ont échoué lamentablement : il est temps de tenter le grand saut dans l’alternance. Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, portés par un soulèvement populiste irrésistible, se retrouvent tous deux au second tour. Le leader de la France insoumise se fait soudain conciliant et tente de reconstituer à son profit le Front républicain de l’année précédente. Mais la droite et une partie du centre sont rebutés par une candidature trop clivante tandis que Marine Le Pen joue l’apaisement : elle est élue.

Voilà le film d’horreur politique qui nous menace. Supputation ? Hypothèse extrême ? Cauchemardesque anticipation ? Certainement. Mais il faut l’avoir en tête, ne serait-ce que pour la conjurer.

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