AFFAIRE SARKOZY : LE DOUTEUX PROCÈS DU PROCÈS - Les amis de l’ancien président se répandent partout en criant au scandale judiciaire et à l’établissement d’un « gouvernement des juges ». Ils oublient au passage quelques vérités désagréables…
Faut-il se laisser impressionner par l’incroyable campagne lancée par les amis de Nicolas Sarkozy – et de Marine Le Pen, pour l’occasion– contre la justice française ? L’opinion, depuis cinq jours, est soumise à un feu roulant d’affirmations douteuses, d’accusations partielles et partiales, d’éléments de langage répétés à loisir sur tous les plateaux, tendant à montrer que les juges ont opéré un « coup d’État » en condamnant l’ancien président à cinq ans de prison.
Ce procès après le procès, il faut le dire, est totalement déséquilibré. Accusée à son de trompe par ce chœur des indignés sur commande, la justice ne répond pas : elle s’est déjà exprimée dans le texte qui accompagne son jugement, longuement argumenté et justifié. Seulement voilà : ce document touffu, juridique à souhait comme il convient, est d’une lecture difficile. On ne le connaît que par bribes, ce qui laisse ouverte une large brèche dans la défense que les juges incriminés pourraient présenter, mais qu’ils ne présentent pas, par tradition de retenue. Rappelons donc quelques vérités largement négligées dans ce furieux débat.
L’affaire Sarkozy-Khadafi, disent les procureurs de la justice, a été déclenchée par un faux publié en 2012 par Médiapart, ce que le jugement récent tend à confirmer en émettant des doutes sérieux sur son authenticité : elle n’aurait donc jamais dû prospérer. Problème : Nicolas Sarkozy a attaqué Médiapart sur cette partie du dossier en portant plainte pour faux et usage de faux ». Il a perdu son procès.
De toutes manières – ce qu’on oublie de dire – les juges qui ont condamné l’ancien président ont écarté ce document pour s’appuyer sur d’autres éléments à leurs yeux plus solides : les déclarations multiples des responsables libyens, anciens ministres ou hauts-fonctionnaires, qui parlent tous d’un financement libyen de la campane de 2007, renforcées par le carnet personnel – authentifié et qui ne devait pas être publié - de Choukri Ghanem, ancien ministre du Pétrole de Khadafi, qui fait état de versement libyens en faveur de la campagne Sarkozy.
À ces éléments pour le moins troublants s’ajoutent les bizarreries françaises : les sommes en liquide transportées par Ziad Takieddine, intermédiaire dans cette affaire, l’argent louche touché par Claude Guéant, et le coffre géant qu’il a loué dans une banque parisienne, le rôle étrange joué par Alexandre Djouhri, autre intermédiaire au pédigrée chargé. Tous ces personnages ont été condamnés par les mêmes juges, sans que personne, parmi les amis de Sarkozy qui crient au complot judiciaire, ne songe venir à leur secours. Mais s’ils sont coupables, leur patron peut-il se dégager de toutes responsabilité ?
Le tout étant couronné par les deux visites secrètes et hautement suspectes, c’est le moins qu’on puisse dire, rendues à Moussa Koussa, organisateur d’attentats terroristes meurtriers pour le compte de Khadafi, par Brice Hortefeux et Claude Guéant, les plus proches collaborateurs de Nicolas Sarkozy. Ce qui fait un dossier lourd, contrairement aux affirmations colportées partout depuis cinq jours.
D’autres soutiens de l’ancien président estiment que le délit d’association de malfaiteurs, qui a entraîné la condamnation, est contraire aux libertés publiques, qu’il avait été aboli par la gauche et de nouveau instauré par la droite. Comme il a été rétabli dans le code pénal (où il figurait depuis 1810…) il y a bientôt quarante ans, ces défenseurs sourcilleux des droits de l’Homme ont mis du temps à se réveiller. En fait, personne ne songe plus à supprimer cette disposition, fort utile dans la lutte contre le grand banditisme et le trafic de drogues. Ce que l’on conteste, au fond, c’est son application à Nicolas Sarkozy, ce qui est un tout autre argument.
On critique enfin l’exécution immédiate de la peine, disposition extraordinaire, contraire à la présomption d’innocence dont doit bénéficier un prévenu qui fait appel de sa condamnation. Or, dès qu’on se renseigne un tant soit peu, on s’aperçoit que cette mesure est appliquée tous les jours par les tribunaux français dès qu’il s’agit d’un délit grave. Là aussi, on s’émeut d’une atteinte supposée aux grands principes pour la seule raison qu’elle touche Nicolas Sarkozy. Ce qui revient à soutenir qu’il doit bénéficier d’un traitement de faveur.
Nicolas Sarkozy a fait appel : il est donc présumé innocent et, surtout, la juridiction supérieure peut fort bien décider que sa condamnation est excessive ou mal fondée et prononcer finalement une relaxe, ou bien atténuer sa peine. C’est le fonctionnement normal de la justice et celui-ci peut profiter à Nicolas Sarkozy. Mais hors de ces rappels utiles et élémentaires, la thèse d’un « complot judiciaire » et de l’instauration d’un « gouvernement des juges », n’est qu’une fable fabriquée pour les besoins de la cause sarkozyste.
Pour un socialisme démocratique renouvelé et indépendant des Insoumis,
Je soutiens LeJournal.info
Le Premier ministre s’appuie sur le bloc central et Les Républicains, renvoyant au Parlement le pouvoir de décider du texte final de son budget. Stratégie subtile et risquée qui ignore les revendications du PS et amadoue le RN, en ouvrant la possibilité d’abolir l’exécution provisoire. Lire l’article
Organisée par la présidente d’Occitanie Carole Delga, la cinquième édition des rencontres de la gauche, s’est imposée comme un rendez-vous incontournable des progressistes, où Raphaël Glucksmann a prononcé le discours le plus convaincant. Lire l’article
Triple défi pour le nouveau président de la SNCF : réhabiliter la qualité de service dans un contexte de concurrence et participer à la décarbonation de l’économie, tout en apaisant un corps social cheminot toujours éruptif. Aller simple, sans garantie d’arriver à destination… Lire l’article
Dans son dernier livre, le célèbre chroniqueur au « Quotidien », décortique les ressorts du succès de Cyril Hanouna et analyse les valeurs et comportements de celui qui est devenu influenceur politique, avec en ligne de mire une candidature à l’élection présidentielle. Il analyse aussi le débat entre CNews et le service public. Lire l’article
Un mois… C’est le temps qu’il reste à Javier Milei pour convaincre l’opinion de la pertinence de sa politique économique. Ses succès en matière d’inflation et d’équilibre budgétaire risquent de ne pas suffire. Lire l’article
La réduction de l’abattement consenti pour les transmissions d’entreprise pourrait faire partie des dispositions étudiées par Sébastien Lecornu en quête de nouvelles recettes fiscales. Lire l’article
LeJournal.info a 2 ans et il a déjà beaucoup grandi, mais nous avons besoin de vous !
Pour nous soutenir, deux formules d’abonnement : annuelle (80€/an) ou mensuelle (4€/mois).